À la sortie du supermarché Spar d’Opuwo, ville poussiéreuse de la région du Kaokoland, au nord de la Namibie, une femme Himba dénude sa poitrine avant de se diriger vers des touristes pour tenter de leur vendre des bijoux de sa fabrication.
J’ai bien vu et je m’étonne. Traditionnellement, les femmes Himba vont seins nus. Mais, quelques minutes plus tôt, dans les travées éclairées aux néons du magasin, je l’avais aperçue vêtue de la traditionnelle jupe en peau, le corps et les cheveux enduits du mélange d’ocre et de graisse qui leur donne un aspect soyeux et velouté… mais avec une étoffe sur le haut du corps. Le tourisme n’aime pas le changement. Certaines femmes Himba, sachant que leur crédit dépend de leur « authenticité », en viennent donc à se conformer à l’image que les visiteurs en quête de dépaysement attendent d’elles.
À Opuwo comme ailleurs sur la planète tourisme, les rites se doivent d’être millénaires et les traditions hors du temps. Sinon, « c’est plus ce que c’était ». L’image « authentique » est une image figée. Un Massaï en Nike, un Aborigène avec des Earpods ou un Inuit en motoneige, allons donc, c’est quand même moins photogénique… Le tourisme, parfois, interdit aux gens de vivre dans leur époque.